GPSO même sort que NDDL ?

, par Bernard

Coup de frein sur les LGV Bordeaux/Toulouse et Bordeaux-Dax (GPSO) :
Une décision de bon sens que s’acharnent à combattre nos élus

Chronologie :


Jeudi 1er février 2018 :

Le rapport du Conseil d’Orientation des Infrastructures (COI), Conseil présidé par Philippe DURON, dévoile une sélection drastique des projets en question pour les 20 ans à venir. Le manque de financements, la pertinence de certains projets et surtout la volonté d’accorder la priorité à l’entretien des routes et lignes ferroviaires du quotidien sont à l’origine de ces orientations.
Parmi ces projets, le GPSO (Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest) en sort passablement esquinté même s’il n’est pas définitivement enterré, du moins pas le
Bordeaux/Toulouse.

Les détails :

  • La ligne Bordeaux/Toulouse serait scindée en 2 phases, Agen-Toulouse d’abord puis Bordeaux/Agen ensuite. Le calendrier initialement prévu pour 2027 pourrait être décalé en 2033/2037 pour le 1er tronçon et le second tronçon pourrait être repoussé au-delà de 2038.
  • Le tronçon de ligne Bordeaux/Dax avec prolongement éventuel vers l’Espagne par le Pays Basque (celui qui nous concerne tout particulièrement) est carrément rayé des objectifs pour les 20 ans à veniret ce, quel que soit le scénario du financement. Et le rapport de justifier cette position : « autant que le coût,c’est la pertinence de cette ligne ; l’infrastructure nouvelle ne serait justifiable que par la saturation de la ligne existante (Bordeaux-Dax-Bayonne), notamment pour répondre aux besoins du fret ce qui n’est pas le cas aujourd’hui et ne semble même pas envisageable à un horizon lointain… Seule la « sécurisation » du tracé est toutefois préconisée…


Vendredi 2 février 2018 :

SUD-OUEST publie les grandes lignes de ce rapport reprenant ce que dit ci-dessus. En voici quelques titres :

- pour la Une (avec une photo d’un TGV arrêté en gare de Dax) : LGV : coup de frein pour Bordeaux-Dax
- en page 2,
« un tri important annoncé pour les grands projets »
« le calendrier très extensible des nouvelles LGV »

Ce même jour, SUD-OUEST nous annonce pour le lendemain « un sondage exclusif sur le projet de LGV vers l’Espagne »

Samedi 3 février 2018 :

Comme annoncé, plus de la moitié de la Une de SUD-OUEST (toutes éditions confondues) est occupée par une grande photo de la gare de Bordeaux Saint-Jean avec en grande incrustation
« LGV vers le Sud : vous dites OUI ! » et avec en bas à gauche de la photo les chiffres de ce sondage :
« 80 % des sondés favorables à la LGV Bordeaux/Toulouse, 78 % à Bordeaux/Dax. Analyse et réactions pages 2 à 6 »
La légende qui accompagne la photo est la suivante : « la ligne Tours/Bordeaux mise en service le 2 juillet bat des records de fréquentation »
Les pages 2 et 3 constituent le dossier du samedi avec un logo « LGV , Stop ou encore »et ce grand titre « LGV vers le Sud, une adhésion massive , mais… »
Sous ce titre, nous prenons connaissance alors des questions du sondage exclusif Sud-Ouest opéré auprès de 1001 personnes de la Nouvelle Aquitaine. Les voici :

1)« Etes-vous favorable à la LGV Bordeaux/Toulouse ?
2)« Etes-vous favorable à La LGV Bordeaux/Espagne ?

les histogrammes ou « camemberts » des résultats des réponses à ces 2 questions sont agrémentés d’un commentaire écrit en gros « 80 % favorable, 20 % opposé »

3) Utiliseriez-vous ces lignes à grande vitesse ?

Bordeaux /Espagne :

42 % (8 % régulièrement 34 % de temps en temps)
58 % (32 % rarement 26 % jamais)


Bordeaux-Toulouse :

37 % (6 % régulièrement, 31 % de temps en temps)
63 % ( 35 % rarement 28 % jamais)


Ces résultats (plus il faut le souligner ceux des questions 1 et 2 que ceux de la question 3) sont commentés par Sud-Ouest : quelques sous-titres : « TER et TGV en même temps » « Etat des lieux : personne ne veut payer »
Le bas des pages 2 et 3 est consacré aux réactions aux « Elus, supporters ou opposants au projet »  : Alain Rousset, Alain Juppé, Pierre Camiani , président PS du CD Lot et Garonne, Elisabeth Bonjean maire PS de Dax, Pierre Hurmic avocat d’assos opposées au projet et élu EELV de Bordeaux, Victor Pachon du Cade et Jean Luc Moudenc maire LR de Toulouse. (4 pour, 3 contre)

La page 4 est consacrée

- au « CIRON, paradis pas encore perdu » le Ciron étant un petit affluent de la Garonne du Sud Gironde en plein sur le tracé de l’éventuelle Bordeaux/Toulouse. - à « la nouvelle ligne indésirable au Pays basque » sous-titrée en rouge : « OPPOSITION »

la page 5 montre la carte du tracé des lignes en projet avec un historique du dit projet (carte et historique fournis par GPSO).

Lundi 5 février :

En page Landes, Sud Ouest donne la parole à Geneviève Darrieusecq et Xavier Fortinon :
Sud Ouest : « LGV : Geneviève Darrieusecq et Xavier Fortinon sur la même ligne »
Xavier Fortinon :Pour lui, « 2038 ça n’a aucun sens, il faudrait tout recommencer à zéro ! ». « En 2013, le même rapporteur avait livré les mêmes conclusions et cela n’avait pas empêché le gouvernement de maintenir ces projets (DUP de Alain Vidalies en juin 2016) , j’espère qu’il en sera de même avec le gouvernement actuel »
« J’appelle tous les élus du territoire à se mobiliser pour la réalisation sans attendre des lignes à grande vitesse Bordeaux Toulouse et surtout Bordeaux/Dax ».

Geneviève Darrieusecq :

Sur la ligne du Gouvernement Philippe, elle note que « il y a besoin effectivement d’améliorer les transports du quotidien et qu’il est logique d’y mettre le paquet ». elle reconnaît aussi que « la France n’a pas lesmoyens actuellement de porter toutes ces grandes infrastructures mais cela ne veut pas dire qu’il faut les enterrer et surtout ceux-là quitte à les décaler dans le temps ; on a besoin de Bordeaux/Toulouse et de Bordeaux/Dax et j’ajoute que si on fait Bordeaux/Toulouse, il faut faire bordeaux/Dax puisqu’il y a un tronçocommun … avec les avantages induits d’ouvrir la voie au fret ferroviaire et de ainsi désengorger la périphérie de Bordeaux ».
Mardi 6 février 2018 :


En pages Landes, un article intitulé « le train des réactions »  :
Parole donnée à Fabien Lainé député de la 1ère circonscription des Landes et à Charles Dayot le maire de Mont de Marsan qui expriment conjointement leur réserve au rapport Duron.
« le COI (conseil d’Orientation des Infrastructures passe à côté d’une solution rapide et efficace pour réduire la présence des camions sur les grands axes »…
Ils demandent aussi « l’amélioration du trajet Mont de Marsan/Bordeaux aussi long qu’un Bordeaux/Paris , l’electrisation de Morcenx/Mont de Marsan et la rénovation de la ligne Bordeaux/Dax »…
Dans le même article, Lionel Causse député de la 2èmme circonscription des landes ne partage pas ces avis et se félicite de la décision du rapport Duron et de sa volonté de donner priorité à l’existant…

Mercredi 7 février 2018 :

En page landes toujours, Sud Ouest publie quelques réactions de lecteurs suite à la prise de position de Lionel Causse en faveur de l’existant :
Sur les 6 réactions publiées, 5 partagent l’opinion de ce député, une seule veut une LGV passant par Mont de Marsan…

Vendredi 9 février 2018 :

En page Landes, SUD-OUEST donne la parole à Renaud Lagrave vice-président de la Région en charge des transports :
Renaud Lagrave : « La LGV entre Bordeaux et Dax ce n’est pas une option : au regard de ce que préconise la Commission européenne pour améliorer le fret ferroviaire (aujourd’hui 2 % seulement du trafic), c’est même une obligation »
« Si on réhabilite la ligne existante, au regard de l’augmentation du trafic et de la demande pour récupérer La LGV Bordeaux/Paris il n’y aurait plus de sillons disponibles »

« Aujourd’hui, la réalité c’est un bouchon ferroviaire tel qu’on le connaissait auparavant au nord de Bordeaux et la réalité c’est donc que si l’on veut plus de fret et plus de trains de proximité il nousfaut cette ligne nouvelle » …


Samedi 10 février :


La chronique du médiateur de Sud Ouest de ce jour intitulée « Controverses sur la ligne » nous informe des réactions nombreuses des lecteurs de Sud Ouest, réactions qui se sont manifestées après la publication du sondage du samedi 3 février. Fabien Pont, le médiateur, nous révèle l’ampleur et parfois la virulence de ces lecteurs quant à l’analyse faite par Sud Ouest des résultats du sondage et même du parti pris du quotidien en faveur du GPSO . Dans un contexte tendu entre la SNCF et les usagers, entre la SNCF et les élus d’autre part, la fin de cette chronique nous explique la difficulté de la tâche des journalistes sur de tels sujets…
Ce même jour dans un encart page 7, nous apprenions que Alain Rousset Président de la région Nouvelle Aquitaine, Carole Delga son homologue d’Occitanie et Jean Luc Moudenc maire de Toulouse avaient été reçus la veille à Paris par le 1er Ministre Edouard Philippe. Ils étaient venus plaider la cause du GPSO et Alain Rousset lui avait en particulier remis le sondage Sud Ouest du 3 février .
Réaction de Alain Rousset à la sortie : « Le 1er Ministre ne ferme aucune porte mais n’en ouvre aucune non plus. Mais dans ce type de dossier, j’en ai l’habitude, il faut tout le temps monter au filet ».

Dimanche 11 février :


A la Une de ce numéro, « Les maires votent une motion de soutien à la LGV Bordeaux/Dax »
A la demande de Hervé Bouyrie, le Président de l’Association des Maires de landes, une motion en faveur de cette LGV Bordeaux/Dax , « maillon indispensable au GPSO et absolument nécessaire au dynamisme et à la croissance de notre département » a été votée à l’unanimité selon l’auteur de l’article. Unanimité à relativiser sans doute puisque Philippe Dubourg, maire de Carcarès et Président des maires ruraux des Landes s’est levé pour exprimer sa méfiance et sa défiance face à cet unanimisme : « on veut nous infliger des projets toujours plus grands qui seront ensuite assumés non pas par nous mais par les générations à venir.. ».

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Avec cette chronologie des faits et articles parus suite à la remise du rapport Duron du 1er février, avec ce choix volontaire de ma part de vous relater exclusivement les articles parus dans Sud Ouest version papier, j’ai voulu essayer d’imaginer ce qu’a pu retenir un lecteur lambda de notre région qui ne fréquenterait que les colonnes de ce quotidien (je crois pouvoir dire que c’est encore le cas de nombreux Aquitains surtout ruraux) et qui voudrait avoir une idée sur la pertinence ou non de ce GPSO.
Je vous en laisse à vous aussi, lecteurs de ce document, tirer les enseignements que vous voulez…

Pour ma part, voici quelques constatations/réaction rapides :
1) dans sa version numérique, les articles de Sud Ouest évoqués ci-avant ont déclenché une vague de commentaires très importante et dont on peut dire en toute objectivité qu’elles n’allaient pas du tout dans l’acceptation du GPSO. (cf les réactions du mercredi 7 févrierde la version papier et la chronique du médiateur du 10 février plutôt « embêté » après un traitement du sondage plus que tendancieux)

2) les articles publiés sur ce GPSO n’ont fait que parler du projet création de lignes nouvelles , jamais du projet rénovation et amélioration de l’existant dont la validité, études indépendantes à l’appui, n’a jamais pu être mise en défaut par les tenants du GPSO. Quand on regarde le trajet Bordeaux/Dax actuel, existant , direct et bien plus court que celui envisagé par Mont de Marsan, on ne peut que se demander où est le bon sens. Où est le bon sens quand on compare le coût d’une amélioration de l’existant 7 à 8 fois moins coûteuse que la création d’une ligne nouvelle. Où est le bon sens quand ce 2ème scénario ne ferait gagner que 4 mn sur un trajet Bordeaux/ Dax avec un bilan environnemental effroyable, une balafre terrible dans notre territoire et une desserte TGV très parcimonieuse de Mont de Marsan par exemple dont la gare serait située extra muros à Lucbardez mais aussi un nombre de dessertes de Dax diminué…

3) Côté technique, par exemple, bien peu de citoyens sont au fait de l’obstruction et de l’opposition de RFF (Réseau ferré de France) à moderniser les signaux lumineux de la voie actuelle Bordeaux/Dax qui permettrait aux trains de rouler sans aucune gêne à 220 km/h au lieu de des 160 actuels.. et cette simple modernisation est d’un coût négligeable face aux projets GPSO envisagés.

4) On pourra noter aussi combien nos « grands » élus se démènent pour occuper l’espace médiatique et l’empressement de Sud Ouest à leur accorder de la place dans ses colonnes de préférence en très gros dans les « Une ». Et l’on notera aussi combien sont mises en avant les dires et actions des pro-LGV si on les compare aux rares espaces accordés aux opposants. Quant aux positions de nos élus de proximité, les maires par exemple, on ne pourra que déplorer l’acceptation quasi unanime des discours que les grands du département leur infligent : Président du CD des landes, maires de Dax et de Mont de Marsan, Président de l’AML, Président de la CCI.

Vous aurez de votre côté ajouté d’autres constats/réactions à cet évènement … et je pense que vous aurez pensé vous-aussi que nous avons là une troublante similitude avec cet autre Grand Projet Inutile et Imposé que fut Notre Dame des Landes…
Puissent l’avenir et surtout la clairvoyance et le bon sens de nos décideurs prochains faire que le GPSO connaisse le même sort que NDDL !

Le 11 février 2018

Bernard Lacomme